Quel support pour la peinture numérique ?

C'est une question souvent posée et à laquelle je suis amené à réfléchir régulièrement : quel est le meilleur support pour la peinture numérique ?

La bataille se joue basiquement entre l'écran et la toile mais les possibilités sont en réalité très nombreuses. On peut en effet imprimer sur différents types de papiers et depuis quelques temps sur des matériaux divers et variés, allant du textile au carrelage...
Quand j'ai commencé à produire des oeuvres numériques, je ne me suis pas posé la question : j'avais un outil en main, je me suis contenté de jouer avec. Mais rapidement, j'ai voulu voir le résultat "en vrai". J'ai donc imprimé mes peintures et je dois dire que le résultat m'a enthousiasmé. Malgré la qualité médiocre de l'impression, l'oeuvre prenait soudain une existence matérielle, prête à rivaliser avec ses aînées. Ca permet de l'apprécier autant dans sa globalité que dans ses détails, ce que l'écran ne propose pas de façon aussi directe.

Plus tard, j'ai cru faire un choix quasi-définitif. En effet, pour exposer, il vaut mieux se rapprocher des codes connus. Arriver avec des peintures numériques est déjà difficile à faire accepter alors si elles ne sont pas palpables, on vous prend pour un imposteur... Bref, histoire de participer à des expositions "classiques" et m'insérer dans le monde de l'art, parmi des peintres "traditionnels", il a bien fallu proposer un vrai support. Je me suis donc adressé à un imprimeur spécialisé qui m'a sorti de magnifiques tableaux sur toile et d'autres sur papier d'art de haute qualité. Le résultat était très séduisant, d'autant que j'avais délibérément choisi des formats assez grands pour mettre en valeur des aspects diffiles à apprécier sur un écran.

C'est à cette époque que j'ai commencé à organiser mon travail, avec des formats bien précis, des tirages en 5 exemplaires signés et numérotés. Mais si cette pratique m'a permis d'exposer et d'apprécier moi-même mes oeuvres sous un autre jour, j'ai fini par y trouver des contraintes. Outre le processus d'impression complexe (obtenir la résolution et les couleurs voulues demande des efforts) et le coût assez élevé de ce dernier pour un résultat digne de ce nom, les grands formats sont beaux mais se vendent mal. Avec le recul, je trouve que l'effort est peu récompensé, si on exclut la satisfaction de voir son oeuvre en grand et de pouvoir l'encadrer.

exposition d'oeuvres d'art numérique(s)

Un jour, une société m'a proposé d'utiliser une partie de mon travail comme motif pour du mobilier et de la vaisselle. Il s'agissait de décliner l'oeuvre, de la détourner, ce que tous les artistes n'acceptent pas forcément. Finalement, ce projet n'a pas abouti mais l'idée m'avait plu. Depuis, j'imagine aussi mes oeuvres sur des tapis ou sur des murs.A l'opposé, j'ai participé à un projet de "chaîne télévisée thématique d'ambiance" à destination d'écrans plasma. Une sélection de mes oeuvres a été faite pour composer une sorte de diaporama animé pour illustrer des lieux tels que restaurants ou halls d'hôtels. Une fois encore, j'ai été séduit par l'idée, d'autant plus que le processus de diffusion est bien adapté au "support" numérique d'origine. La qualité et la dimension des écrans plats d'aujourd'hui permettent d'envisager un rendu capable de rivaliser avec les impressions grand format et il faut reconnaître que le résultat est plus fidèle au travail initial. D'un autre côté, le support physique a un charme qui n'apparaît pas dans ce cas et l'effet "peinture improbable" avec lequel j'ai beaucoup joué s'en trouve estompé.

Aujourd'hui, c'est l'écran au sens large qui m'attire, à commencer par l'écran d'ordinateur, celui qui permet à des millions de gens de visualiser ce qu'il y a sur le web (oui, celui que vous regardez probablement en ce moment). Il a beau être limité en taille et en qualité, ce support est le plus répandu, le plus accessible et le plus utilisé pour visualiser des oeuvres d'art, sans doute loin devant les livres et les toiles dans une exposition. La démocratisation des téléviseurs à écrans plats, dont le format moyen à tendance à augmenter, est aussi une opportunité à saisir.

Je me pose donc la question de "m'adapter" pleinement à ce support et d'envisager que des oeuvres ne soient pas destinées à être imprimées mais uniquement à être vues et appréciées par ce biais. Reste donc à trouver comment faire passer de cette manière toute l'émotion qui surgit de l'oeuvre imprimée sur un support physique, à moins que ce ne soit qu'une utopie...

Bref, au bilan, je crois que la peinture numérique doit s'accommoder de tous les supports. On pourrait presque affirmer que c'est sa raison d'être. Malheureusement, l'idée d'une oeuvre d'art immatérielle reste encore aujourd'hui un obstacle "culturel" majeur. Je veux dire par là que la reconnaissance de ce genre d'oeuvre est encore loin d'atteindre celle d'un tableau dans un musée, que ce soit par les instances officielles que par le grand public. Mais finalement, ce n'est qu'un problème secondaire : concentrons-nous sur la création et les mentalités évolueront !



Commentaires

  1. Jean Maréjano

    art plastique numérique
    Je suis artiste numérique depuis de longues années - 1978...- A cette époque déjà certain s'interrogeaient sur l'appartenance à un courant d'expression spécifique. Un thème récurant a été longtemps celui de la "complexité". Nous de parlons pas ici d'une oeuvre compliquée, mais de la faculté de se servir des aptitudes que présente l'outil informatique- hard et soft- à reproduire ad libidum des motifs en situation, couleurs, positions dans l'espace... Il est alors préconisé de chercher des effets picturaux servis par l'outil informatique. Que l'on ne s'y m'éprenne pas, il ne s'agit pas, seulement d'une technique par exemple comparable à celle réalisée avec un couteau à peindre... Mais de conjuguer, décliner les différentes techniques des arts plastiques numérique, comme le mat painting, speed painting et bien d'autres techniques numériques. L'emploi isolé ou, la combinaisons de ses techniques numériques crée un mouvement d'expression bien spécifique et facilement identifiable. Il est fortement regrettable pour les arts plastiques numériques de les voire rabaissés au simple rang d'une technique. A quoi bon reproduire avec l'art numérique ce qui peut être fait avec des techniques conventionnelles de peinture...vaste débat ! La peinture numérique cherche ses marques tout comme la photographie en son temps...Elle a besoin d'un débat sérieux et surtout qu'on la serve avec ferveur et intelligence.
    recherche sur internet avec : Jean-Angélo Maréjano Digigraphie

  2. j'adore moi aussi

    j'adore la peinture la photo et l'art numerique

  3. Delphine Dy

    transposition automatique ?
    Le fonction de l'art est d'exprimer. Personnellement, je me moque bien de savoir ce que peut bien représenter la peinture numérique : technique, courant, philosophie,.... La graine va là où le vent la sème.
    Je fais de la peinture numérique, pour moi aussi le support final est un casse-tête : difficile de compose un tableau lorsque l'on ne sait pas sur quoi il finira...
    Les grands écrans me séduisent au plus haut point aussi : c'est merveilleux comme rendu des couleurs (j'adore les couleurs un peu flash et les contrastes, un écran, c'est le paradis !). Je rêve de faire une exposition qui mêle l'écran et le papier. J'ai testé mes création sur un grand écran, cela change la vie !
    Aujourd'hui, lorsque je crée, je crée à priori pour une impression papier 20x30 minimum. Bien sûr, du coup certaines créations ne dépasseront pas ce format, mais on s'aperçoit que finalement, le grand format sied à la majorité (en révisant parfois certains détails).
    Se reporter sur des objets, c'est facile à tester aujourd'hui, mais toute création ne convient pas : je ne crois pas à la transposition automatique d'un support à l'autre (au-delà des problèmes techniques). L'exemple de la vaisselle est très signification : une assiette, ce n'est pas plat, cela donne des reflets, il y a un encadrement, c'est rond, cela doit s'accorder avec un grand nombre de nappes ET SURTOUT cela doit s'accorder avec les mets.

  4. noureddine EL HANI

    La peinture numérique n’est certainement pas un courant artistique.
    Pinceaux en congé ! « Si l'art ne m'amusait plus, je n'y jouerais plus ». Michel JAFFRENNOU. Si l’on considère que la peinture c’est d’abord “l’aménagement” d’un espace bidimensionnel, quelque soient ses dimensions, sa technique, son support, on peut admettre plus facilement l’idée qu’elle puisse être traitée virtuellement. Il suffit d’adapter ses réflexes de peintre devant la toile et de considérer l’écran de l’ordinateur comme étant un espace “vierge”. Un effort d’abstraction nécessaire pour se verser dans la picturalité en tant que concept. La manipulation de l’outil sera ainsi plus aisée et l’on oublie, presque, le(s) support(s), aussi bien la toile que l’écran. Le dispositif technique (outils traditionnels du peintre, appareil photographique, logiciels...) sera au service de l'idée. Par ailleurs, la photographie plasticienne en tant que mode d'expression, est élaborée sous le même angle. En fait, je m'inscris dans l'optique de Man RAY:«Je photographie ce que je ne désire pas peindre, et je peins ce que je ne peux pas photographier ».

  5. Je suis complètement d'accord : la peinture numérique n'est pas un courant artistique, ce n'est qu'une technique. Il n'empêche que la question du support final ou des supports finaux reste importante.

  6. Le choix d'un support est un sujet de réflexion et de choix incontournable pour tout artiste travaillant avec le médium numérique. Les écrans, avec leur luminosité et le rendu riche des couleurs sont très attrayants, mais est-ce que le public est prêt à mettre de côté l'aspect tangible d'une oeuvre sur papier, sur toile, plexiglass, métal ou autre? Il y a encore du chemin à faire à mon avis.

  7. Je suis persuadé qu'il y a de la place pour tous les supports, justement parce qu'ils sont différents et ne peuvent se substituer les uns aux autres. Il reste un intérêt à voir une œuvre palpable en tant qu'objet unique révélé par une lumière externe autant qu'il y en a un à faire apparaître une œuvre sur un écran de manière insaisissable et éphémère. Sans que ça paraisse, l'usage d'un écran pour visualiser une œuvre d'art est déjà très répandu. S'il y a un chemin à faire, il concerne surtout notre regard dans ce cas de figure, qui n'est pas le même que sur une œuvre matériellement présente.

  8. anrchangel

    l'essentiel de l'art et de le faire pour l'art en premier et pour le partage ensuite le reste n'est qu'une illusion c'est pourquoi le support d'une oeuvre graphique est important et si il peut être multiple c'est encore mieux

  9. bonjour, en logiciel j'utilise arts rage pro que je trouve vraiment presque aussi réaliste que peindre sur toile sauf que sur tablette c est un peu trop petit donc existe tèil des grand écran tactile sur les quelles ont peut installer des logiciels genre arts rage et à la place d 'un styler avoir un pinceaux genre une tablette géante quoi merci de votre aident

  10. Art Rage est très intéressant en effet. Pour répondre à votre question, il existe des écrans tactiles de grande taille pour les ordinateurs. Cependant, peu d'entre eux offrent un très bon niveau de précision pour le dessin ou la peinture. Le seul vraiment adapté à ma connaissance est le Cintiq de Wacom car il a été conçu pour.

  11. Philip

    Bonjour a vous amis artistes numériques, en tant qu'artiste numérique, je travaille sur une tablette Samsung Galaxy Note de 12.1 pouces avec stylet genre Wacom sensible à la pression (1024 niveaux) et c'est un vrai plaisir !

    Effectivement, en tant que membres d'un club d'artistes traditionnels, ce fut un peu difficile à accepter, Finalement je fait imprimer des séries limitées sur toile signées et numérotées de 1 à 5 et çà passe comme çà. ...J'ai comme inventé un mot pour çà: des virtuographies au lieu de lithographies.... Pourquoi pas ?

    Mais je trouve que idéalement les oeuvres numériques devraient être vues dans leur format natif, soit sur écran LCD : bien plus lumineux (couleur lumière versus couleur matière) mais çà va prendre encore un peu de temps avant que les mentalités changent. ...

    Philip

  12. Gérard Masson

    Bonjour, je travaille le numérique depuis une vingtaine d’années. Je me considère comme un metteur en scène, l’essentiel pour moi c’est le graphisme. J’ai peint en traditionnel, que j’ai abandonné je n’éprouvais rien, ma création était stérile, Je ne voulais pas peindre pour peindre, l’ordinateur m’a donné la réponse.

    Je travaille avec Photoshop et seulement avec les calques. Pas de stylet, pas de tablette. Je dirais du numérique, «expression numérique» et non «peinture numérique», beaucoup d’artistes travaillent avec le numérique, mais avec des techniques et des visions très différentes, qui non rien à voir avec la peinture dite «traditionnelle » pour moi le numérique c’est çà, ne pas vouloir copier les techniques traditionnelles.

peinture numérique  art numérique  support  toile  écran  papier  impression  imprimer